🙋♂️ Principe fondamental : l’IA, un assistant, pas un remplaçant
La métaphore du copilote
Imaginez-vous aux commandes d’un avion. L’IA est votre copilote – compétent, utile, capable de gérer beaucoup de tâches. Mais c’est vous le commandant de bord. C’est vous qui décidez de la destination, qui prenez les décisions critiques, qui êtes responsable des passagers. Le jour où vous laissez le copilote prendre toutes les décisions, vous n’êtes plus pilote, vous êtes passager.
Cette métaphore capture l’essence de la relation saine avec l’IA : collaboration, pas abdication.
L’humain toujours dans la boucle
Le principe de l’humain dans la boucle repose sur une implication active à chaque étape de l’utilisation de l’intelligence artificielle. Cela signifie que l’intervention humaine est indispensable avant, pendant et après le recours à l’IA, garantissant ainsi une utilisation responsable et maîtrisée de cet outil.
Avant l’utilisation de l’IA
Avant toute interaction avec l’intelligence artificielle, c’est vous qui définissez le cadre d’utilisation. Il vous revient de déterminer ce qu’il souhaite demander à l’IA, de choisir la manière de formuler sa demande et de préciser l’angle à privilégier. Cette phase de préparation oriente le travail de l’IA et permet d’obtenir des résultats pertinents et adaptés aux besoins.
Pendant l’utilisation de l’IA
Au cours du processus, vous conservez un rôle de guide. Vous intervenez pour corriger, ajuster ou réorienter les propositions de l’IA. L’intelligence artificielle suggère des pistes, propose des contenus ou des analyses, mais c’est toujours vous qui gardez la main sur la direction à suivre. Cette collaboration dynamique permet de tirer le meilleur parti des capacités de l’IA tout en respectant l’intention initiale.
Après l’utilisation de l’IA
Enfin, l’étape de validation vous revient exclusivement à. Il s’agit de vérifier, d’affiner et de valider les résultats produits par l’IA. Aucun contenu, aucune décision ne doit être diffusée ou adoptée sans votre accord explicite. Cette vérification finale garantit la fiabilité, la pertinence et l’éthique des actions menées avec l’aide de l’intelligence artificielle.

La valeur ajoutée humaine : ce que vous seul pouvez apporter
Dans un monde où l’IA peut écrire, que reste-t-il au journaliste ? Tout ce qui fait l’essence du métier :
- L’expérience vécue : Vous étiez là. Vous avez vu, senti, ressenti. L’IA ne le peut pas.
- L’intuition : Ce sixième sens qui vous dit qu’il y a une histoire derrière les apparences.
- L’empathie : La capacité de connecter humainement, de comprendre la souffrance, la joie, la complexité humaine.
- Le jugement éthique : Comprendre les nuances morales, les dilemmes, les conséquences humaines.
- La responsabilité : Vous signez, vous assumez. Cette responsabilité donne du poids à votre travail.
🛠️ Stratégies de vérification et de fact-checking des contenus IA-générés
À l’ère de l’intelligence artificielle, la vigilance s’impose face à la production automatisée de contenus. Si l’IA peut générer des textes crédibles, elle commet aussi des erreurs qui peuvent nuire à la crédibilité du journaliste. Voici un guide pour fact-checker les informations issues de l’IA, à intégrer dans votre routine éditoriale.
Citations et déclarations : traquez l’authenticité I Les citations générées par l’IA sont parfois inventées ou déformées. Avant de publier une déclaration, recherchez-la sur Google en la mettant entre guillemets et retrouvez la source originale (vidéo, discours officiel, transcription). Ne vous fiez jamais à une simple paraphrase lue dans un autre média : seule la déclaration authentique fait foi. Par exemple, si le texte suggère « Le Président de la République a déclaré que… », retournez impérativement au discours d’origine.
Statistiques et chiffres : remontez à la source I L’IA peut mélanger des chiffres issus d’années ou de pays différents. Pour chaque statistique, retrouvez la source primaire (INSEE, Eurostat, ONU, etc.), vérifiez la date de publication et confrontez l’information à au moins deux autres sources officielles. Cette rigueur évite les amalgames et les chiffres erronés.
Noms propres : priorité à la précision I Une confusion d’homonymie ou l’attribution d’une ancienne fonction arrive vite. Contrôlez systématiquement l’orthographe des noms propres et assurez-vous que les titres ou fonctions sont à jour au moment de la publication.
Dates et chronologie : gardez le fil I Les erreurs de chronologie sont fréquentes avec l’IA. Contrôlez chaque date via des sources d’archives fiables et vérifiez la cohérence temporelle des faits (notamment la relation de cause à effet). Un événement mentionné hors contexte temporel peut fausser la compréhension globale.
Sources inexistantes : débusquez les inventions I L’invention de références académiques ou de rapports est un phénomène courant. Testez l’URL fournie, recherchez le titre de l’étude ou du document sur le site officiel et assurez-vous de leur existence réelle. Ne vous contentez jamais d’une citation bibliographique sans vérification.
Quatre réflexes à adopter
- Intégrez dans votre requête d’exiger que l’IA cite ses sources pour chaque nom propre, citation, date et chiffre.
- Isolez les éléments vérifiables : noms propres, dates, chiffres, citations.
- Exigez une source primaire pour chaque information clé.
- Recoupez toujours avec au moins deux sources fiables et indépendantes.
En adoptant ces réflexes, vous sécurisez vos contenus et préservez la confiance du public. La technologie évolue, mais la responsabilité éditoriale reste entre vos mains : vérifiez, recoupez, validez avant de publier.
💡 Transparence : informer le public de l’utilisation de l’IA
Pourquoi la transparence n’est pas négociable
La confiance est votre capital le plus précieux. Elle met des années à se construire, des secondes à se détruire. Dans un monde où les deepfakes et la désinformation prolifèrent, être transparent sur l’utilisation de l’IA n’est pas une faiblesse, c’est une force.
Imaginez la réaction de vos lecteurs s’ils découvrent que vous utilisez l’IA sans le dire. La suspicion s’installerait : « Qu’est-ce qu’ils nous cachent d’autre ? » « Peut-on encore croire ce journal ? » La transparence préventive évite cette crise de confiance.
Comment signaler l’utilisation de l’IA : les meilleures pratiques
1. La mention explicite Quand l’IA a joué un rôle significatif, dites-le clairement :
- « Cet article a été rédigé avec l’assistance d’une IA pour la transcription des interviews »
- « Les données ont été analysées avec l’aide d’outils d’IA »
- « La traduction initiale a été réalisée par IA et vérifiée par notre rédaction »
2. Le niveau de détail approprié Pas besoin d’un roman, mais soyez précis :
- ❌ « Cet article utilise la technologie »
- ✓ « Les graphiques de cet article ont été générés avec l’assistance de ChatGPT et vérifiés par notre équipe »
3. La distinction claire des rôles Précisez qui fait quoi :
- « Enquête et rédaction : [Votre nom]. Assistance technique IA : transcription et mise en forme des données »
4. La page de politique éditoriale Créez une page expliquant votre politique d’utilisation de l’IA :
- Quels outils vous utilisez
- Pour quelles tâches
- Vos garde-fous éthiques
- Votre processus de vérification
Ces recommandations s’appliquent principalement aux rédactions journalistiques, mais peuvent être adaptées à d’autres secteurs utilisant l’IA dans la production de contenu, tels que la recherche, l’entreprise ou la communication interne.
[Exercice : Rédigez votre propre politique – Écrivez un paragraphe de 100 mots expliquant votre utilisation de l’IA de manière transparente mais rassurante. Testez-le sur des non-journalistes : comprennent-ils ? Sont-ils rassurés ?]
Les différents niveaux de divulgation selon l’usage
Tous les usages de l’IA ne nécessitent pas le même niveau de divulgation :
Usage mineur (pas de mention nécessaire) :
- Correction orthographique
- Suggestions de synonymes
- Reformatage technique
Usage modéré (mention recommandée) :
- Transcription d’interviews
- Aide à l’analyse de données
- Génération de graphiques
Usage majeur (mention obligatoire) :
- Co-rédaction substantielle
- Génération de contenu original
- Création d’images/illustrations
La communication positive : transformer la transparence en atout
Au lieu de présenter l’IA comme un mal nécessaire, présentez-la comme un outil au service de la qualité :
« Grâce à l’assistance de l’IA pour la transcription, notre journaliste a pu passer plus de temps sur le terrain, rencontrant 15 témoins au lieu de 5 habituellement. »
« L’analyse assistée par IA nous a permis d’examiner 10 ans de budgets municipaux et de révéler des tendances invisibles à l’œil nu. »
🛡️ Protection de votre vie privée et de vos sources
Imaginez ce scénario : vous tapez dans ChatGPT « Comment rédiger un article sur les pratiques fiscales de [nom d’entreprise] à la suite de la fuite de documents internes ? » Félicitations, vous venez potentiellement de griller votre enquête. Et peut-être vos sources.
La règle absolue : zéro donnée sensible dans l’IA publique
Pas de « juste cette fois » ou « juste pour voir ». Les IA publiques comme ChatGPT, Claude ou Gemini stockent et analysent vos interactions. Même si les entreprises promettent la confidentialité, les politiques changent. Google a déjà modifié ses conditions pour utiliser les conversations à des fins d’entraînement. Microsoft, OpenAI, Anthropic – tous se réservent des droits sur vos données.
Concrètement, ne mettez jamais dans une IA :
- Les noms de vos sources (même codés)
- Les extraits de documents confidentiels
- Les détails d’enquêtes en cours
- Les informations géolocalisées précises
- Les coordonnées personnelles
Voici le test simple : pourriez-vous publier cette requête telle quelle sur Twitter sans conséquence ? Non ? Alors elle n’a rien à faire dans une IA.
L’alternative sécurisée : utiliser un modèle de langage en local
Pour rédiger ou transcrire du contenu sensible, vous pouvez installer des modèles de langage en local avec un outil comme LM Studio. Vous pourrez alors choisir les modèles locaux de Mistral, de Claude ou de Llama (Méta) pour les utiliser sur votre ordinateur sans que vos données soient envoyées sur Internet.
👨🏫 Comment installer LM Studio sur votre ordinateur :
Ce module a été rédigé par Léonard Keat, expert en cybersécurité et IA chez Advens, diplômé ingénieur de l'école Télécom SudParis.